Barbara Laborde venue en renfort parler du film...

Barbara Laborde venue en renfort parler du film...
... de Jacques Becker sur Casque d'or

Au Club, quand Liesel et Elodie racontent...

Au Club, quand Liesel et Elodie racontent...
... Casque d'Or, les Apaches du Paris de la Belle Epoque.

Il reste donc tout l'été à Liesel et Elodie...

Il reste donc tout l'été à Liesel et Elodie...
... pour terminer leur roman. A suivre !

Bienvenue à la Bellevilloise avec Liesel Schiffer et Elodie Scée...

De février à juin 2010, Liesel Schiffer et Elodie Scée sont en résidence d'écriture à la Bellevilloise.

samedi 17 juillet 2010

Toutes les vidéos de la résidence à voir...

Vous pouvez retrouver les teasers des vidéos de la résidence de Liesel et Elodie à la Bellevilloise sur ce lien. Elles sont réalisées par Frank Mukasa qui prépare aussi un petit film sur le sujet... A suivre !
http://www.lieselschiffer.fr/video/

mercredi 30 juin 2010

Un second extrait du roman à 4 mains “les Bellevilloises”

Chérifa, Paris, 2010 par Elodie
“Chérifa remontait lentement la rue de Ménilmontant, de plus en plus pentue à mesure que l’on s’approchait de la rue des Cascades. A l’angle elle salua Momo, le patron du bistrot, ignora Aziz, son fils, qui la snobait depuis toujours, et sonna au 48. Elle avait rendez-vous avec Nadia, sa copine à la vie à la mort, ou presque. L’interphone resta muet. Chérifa traversa la rue, se posta sur le trottoir d’en face, et mit les mains en porte voix : « Nadia ! », s’égosilla-t-elle, « Nadiaaaa ! ». Une fenêtre s’ouvrit, la mère de Nadia apparut : « elle est sortie Nadia, elle est sortie ». Chérifa lui fit un signe de tête entendu, haussa les épaules, et se mordit les lèvres. Sortie ? C’était bien la peine de se donner rendez-vous. Qu’allait-elle bien pouvoir faire ? Tout en fulminant la jeune fille avait déjà atteint la rue de Ménilmontant. Elle attendit que le bus 96 passe, traversa d’un pas pressé, et s’engagea rue Boyer. Peut-être que Nadia était chez Myriam. En passant devant le centre de danse africaine, elle jeta un coup d’œil par la vitre, vit son reflet dans le miroir qui se trouvait au fond de la salle, et se trouva soudain parmi tous ceux qui suivaient le cours. Elle ralentit : le danseur était vraiment beau…. Les sons étouffés des djembés résonnaient jusque sur le trottoir. Elle faillit bousculer un groupe de filles qui sortaient du porche de la Maroquinerie, une salle de concerts où elle était allée une fois avec des copains qui avaient eu des invitations. Elle sourit à ce souvenir. C’était une bonne soirée, même si elle n’avait pas trop aimé la musique. Elle dépassa la Bellevilloise, c’était marqué sur un grand panneau, et se posta à l’entrée du 17 de la rue Boyer. C’est là qu’habitait Myriam, et Chérifa était à peu près sûre de la voir arriver d’un moment à l’autre. Les filles passaient leur temps à déambuler dans la rue. C’était leur quartier, même si maintenant, des centaines « d’étrangers » se pressaient au 19-21. A la Bellevilloise.
Chérifa entretenait un rapport ambigu avec ce lieu branché, un peu mystérieux, avec ses deux entrées, ses queues interminables les soirs de concerts. Elle aurait bien voulu y pénétrer, mais en rien elle ne ressemblait au public qui s’y rendait : des bobos ou des vieux. Pour Chérifa, les vieux, c’étaient les trentenaires, et les vieillards, tous ceux qui dépassaient la quarantaine. A 17 ans, la jeune fille se sentait immortelle.
Ni Nadia ni Myriam ne pointaient le bout de leur minois, et Chérifa n’osait sonner chez cette dernière, car elle avait eu de nombreuses fois le sentiment que la mère de celle-ci ne l’appréciait guère. Son amie la taquinait en la traitant de parano, mais Chérifa avait bien senti le regard peu amène de la grosse dame. On aurait dit qu’elle n’aimait pas trop les arabes… Mais bon, c’étaient des suppositions, hein. Chérifa s’adossa au mur de l’immeuble, et se mit à observer les va et vient à l’entrée du 19-21, une grande grille ouverte. Des grappes humaines en sortaient avec des éclats de rire, des gens pressés s’y engouffraient d’un air entendu. La plupart semblaient ici chez eux. Seuls quelques curieux hésitaient à l’entrée (et pour la plupart, parce qu’ils attendaient quelqu’un qui ne tardait pas à arriver), les autres parce qu’ils déchiffraient le programme placardé au mur. Il lui sembla qu’un ou deux étaient de réels étrangers, attirés là par un guide bienveillant, soucieux de faire découvrir le Paris d’aujourd’hui : à la rubrique « the place to be », ne pas manquer La Bellevilloise, rue Boyer, 20ème. Chérifa soupira, et se mordit consciencieusement les lèvres : pourrait-elle un jour y entrer, sans se sentir deux fois plus étrangère ? Une bourrade sur l’épaule interrompit sa méditation.”
(A suivre...)

Les premières lignes du roman “les Bellevilloises”

Jeanne, Paris en 1902, par Liesel
“- Dix gros pains, huit bâtards, cinq miches et douze couronnes…” Jeanne ne se rend pas compte de l’allure bizarre que lui donne cet ânonnement. Sous son châle de laine entortillé sur sa tête, ses lèvres ainsi perpétuellement agitées, on dirait l’une de ces vieilles bigotes de Notre-Dame-de-la-Croix de Ménilmontant. Si le dimanche est leur jour de prédilection, il y en a toujours une ou deux, le reste de la semaine, assise face à un porte-bougies dégoulinant de cire planté devant une statue de saint, la tête couverte inclinée dans une perpétuelle adoration, les doigts entrecroisés sur une prière qu’on croit deviner de supplication. Jeanne entre parfois dans l’église, non qu’elle ait la foi, bien qu’elle tienne plus que tout à la petite croix d’or qui pend à son cou, l’unique souvenir de sa mère, mais dans des moments de grande fatigue ou de désespoir, c’est le seul endroit où l’orpheline trouve une forme de solitude calme. Des instants arrachés au quotidien pour tenter d’oublier, quelques minutes seulement, la dureté du monde. Sophie, son irrespectueuse benjamine, ne manque jamais de se moquer de ces incursions “dans la maison des curés”.
Ce n’est pourtant ni un chapelet ni un missel que la jeune fille tient entre ses mains ce matin, mais une besace de toile blanche de poussière de farine. “- Dix gros pains, huit bâtards, cinq miches et douze couronnes et il faut rapporter les moules des Kugelhopf demain après-midi et aussi demander les torchons à la blanchisserie. Dix gros pains, huit bâtards… ” Il fait si froid, au cœur de l’hiver parisien, que Jeanne a l’impression de sentir son cerveau gelé tels les pavés qu’elle arpente d’un pas moins décidé que d’habitude, de peur de glisser. Ce n’est pas le moment de mécontenter madame Miquel, la responsable du dépôt de pain de la rue de la Mare. La grosse femme, toujours plantée en vigie derrière son comptoir, au point qu’on croirait qu’elle n’a pas de jambes, songe Jeanne chaque fois qu’elle entre dans la petite échoppe assombrie par les carreaux passés au blanc d’Espagne, bougonne souvent pour cacher, finalement, une nature généreuse. C’est elle qui, spontanément, voyant les filles Lutz lui acheter du pain en quantité de plus en plus réduite, Jeanne extrayant ses piécettes d’un air soucieux au fond de son porte-monnaie, a suggéré à celle-ci de proposer ses services à la Bellevilloise. Jeanne connaît toutes les boutiques de cette coopérative du quartier; il y a la grande boulangerie de la rue Etienne-Dolet devant laquelle les sœurs aiment à respirer la chaude odeur qui se dégage par les soupiraux de l’entresol, l’épicerie de la rue Palikao, si tentante avec les piles de plaques de chocolat à l’étal et ses hauts bidons de lait lustrés comme dans une ferme modèle, et aussi celle de la rue Duris, tenue par un homme très gentil, le père Thomas, un ancien couvreur, réduit à jouer les marchands depuis qu’une mauvaise chute l’a laissé bancroche. Madame Miquel raconte qu’il fait partie des fondateurs de l’association, créée il y a près de vingt-cinq ans par des ouvriers des maisons Cornély et Barriquand, des gens “engagés” affirme la boulangère, dont certains auraient même connus Louise Michel. D’ailleurs, murmure-t-on dans le quartier, Da Costa en personne, celui qui écrit l’histoire de la Commune, a rendu visite au père Thomas dans son galetas de la rue de Ménilmontant.”
(A suivre...)

mercredi 23 juin 2010

Les vidéos souvenir des cinq mois de la résidence de Liesel et Elodie...

... à retrouver sur le site : http://www.lieselschiffer.fr/video/
Et bientôt, en ligne aussi, celle de la dernière séance du 22 juin... L'aventure continue !

jeudi 10 juin 2010

Deux jours avant la fête de la musique, Liesel et Elodie accueillent des artistes amis, le 19 juin à la Halle aux Oliviers

Pour célébrer en beauté leur dernière intervention à la Bellevilloise après cinq mois de présence, Liesel et Elodie ont décidé, parce que le lieu est dédié, depuis sa fondation, aux arts, à leurs créateurs et à ceux qui viennent les découvrir, d’inviter des artistes qu’elles aiment. Ainsi, dès 16 heures, vous pourrez applaudir “Das Freaks Lied”, un duo étonnant autant que doué avec Juliette, la sublime divette et Antoine, l’inénarrable contrebassiste. Et aussi “1er Avertissement”, un groupe de danseurs hip hop reconnu, énergique, détonnant et inventif, présenté par Saïd Bahij, cinéaste-poète-musicien et défricheur de talents.
Puisque Zoxea, des Sages Poètes de la Rue, ne pourra être présent, le vidéaste Frank Mukasa a concocté une petite surprise autour du rappeur.
Entre notes et chorégraphie, Liesel et Elodie vous liront chacune le premier chapitre de leur roman à quatre mains sur la Bellevilloise, étape ultime de leur résidence... dans l’espoir de vous donner envie de connaître la suite ! Elles vous en révéleront aussi le titre.
Sans oublier le matin, dès dix heures, sur la mezzanine, l’atelier d’écriture. Venez nombreux leur dire au revoir !

mardi 18 mai 2010

Rappel du rendez-vous, samedi prochain, le 22 mai autour de Casque d'Or

A 16 heures, au Club, à la Bellevilloise, Liesel et Elodie vous accueilleront pour vous raconter la vie d'Amélie Elie, cette prostituée de la Belle Epoque qui connut la notoriété sous le pseudonyme de Casque d'Or, pour avoir été au coeur d'une bataille rangée entre Leca de la Courtille et Manda de Charonne, deux marlous rivaux. Une plongée au coeur du Paris des Apaches de la Belle Epoque, à travers le film de Jacques Becker commenté par Barbara Laborde avec Géraldine Szajman qui incarnera à son tour la belle pierreuse à travers quelques lectures...

jeudi 29 avril 2010

Prochaine rencontre , le 22 mai... cette fois-ci autour de Casque d'Or

Après Louise Michel l'anarchiste exaltée, c'est autour de Casque d'Or, la prostituée parisienne de la Belle Epoque, que Liesel et Elodie vous proposent une rencontre, le samedi 22 mai à 16 heures.
Barbara Laborde, spécialiste du cinéma, présentera, avant sa projection, le film de Jacques Becker, tourné en 1952 avec Simone Signoret et la comédienne Géraldine Szajman fera revivre l'héroïne par la lecture d'extraits de ses mémoires parues dans la revue “Fin de siècle” en 1902.
Bien sûr, le matin, dès 10 heures, Liesel et Elodie vous accueilleront sur la mezzanine de la Halle aux Oliviers pour leur désormais traditionnel atelier d'écriture qui tournera, cette fois-ci, autour de la littérature populaire et du polar... Elles vous attendent déjà, venez nombreux !

mardi 13 avril 2010

Pour prolonger la réflexion de notre intervention du 10 avril, quelques lectures…

Sur Louise Michel :
- “Mémoires”, Louise Michel, La Découverte, Paris, 2002.
- “La vierge rouge, biographie de Louise Michel”, Xavière Gauthier, Les Editions de Paris Max Chaleil, Paris, 2005.
- “Mémoires d’un communard”, Gaston Da Costa, Larousse, Paris, 2009.
- “Les aventures de ma vie”, Hubert de Rochefort, Mercure de France, collection “le Temps retrouvé”, Paris, 2005.
- “Le roman de Rossel”, Christian Liger, Robert Laffont, Paris, 1998.
- “Regard d’un Parisien sur la Commune”, photographies inédites de la Bibliothèque Historique de la Ville de Paris, Jean Baronnet, Gallimard, Paris Bibliothèques, Paris, 2006.
- le DVD sur “Louise Michel, la révolutionnaire rêvée”, par Xavière Gauthier et Véronique Fau-Vincenti, Regards (www.regards.fr)
- le musée de l’Histoire Vivante, à Montreuil, où sont conservées des archives concernant Louise Michel : www.museehistoirevivante.com
Et en ce moment à l’affiche au cinéma “Louise Michel, la rebelle”, de Solveig Anspach, avec Sylvie Testud, Nathalie Boutefeu et Bernard Blancan.

et sur l’Utopie :
- “L’utopie”, Thomas More, Librio Philosophie, Paris, 2003.
- “La cité du soleil”, Tommaso Campanella, Droz, Paris, 1990.
- “Changer le monde sans prendre le pouvoir”, John Holloway, Syllepse eds. 2008.
- “Misère de l’historicisme”, Karl Popper, Plon, Paris, 1956.
- “L’utopie, textes choisis et présentés”, Frédéric Rouvillois, Flammarion, Paris, 1999.
- “Dictionnaire des utopies”, Michèle Riot-Sarcey, Thomas Bouchet et Antoine Picon, Larousse, Paris, 2002.
- Le réel de l’utopie, essai sur le politique au XIXème siècle”, Michèle Riot-Sarcey, Bibliothèque Albin Michel Histoire, Paris, 1998.
- “Utopie, la quête de la société idéale en Occident” sous la direction de Lyman Tower Sargent et de Roland Schaer, Bibliothèque Nationale de France-Fayard, Paris, 2001.
- “Ces immigrés qui ont fait la France”, Dimitri Casali et Liesel Schiffer, Aubanel, Paris, 2007 (le chapitre concernant le saint-simonien Ismaël Urbain)

A noter l’intéressant site sur le familistère de Jean-Baptiste Bodin à Guise, dont l’expérience continue, sous diverses formes : www.familistere.com

vendredi 9 avril 2010

Demain samedi 10 avril, rendez-vous autour de Louise Michel et l'utopie

N'oubliez pas le matin, sur la mezzanine de la halle aux Oliviers à 10 heures, Elodie et Liesel vous attendent pour l'atelier d'écriture... et l'après-midi, à 16 heures, dans le forum se tiendra le café littéraire consacré à Louise Michel et à l'utopie avec Jean-Michel Couvreur, professeur de philosophie.
Venez nombreux ! Entrée libre au 19 rue Boyer.
La vidéo de l'atelier de février par Frank Mukasa accessible sur le site www.lieselschiffer.fr à la rubrique "Vidéo" ou ici :
http://www.lieselschiffer.fr/video/la-bellevilloise/

mardi 6 avril 2010

Venez rencontrer Liesel et Elodie jeudi 8 avril...

... sur la mezzanine de la halle aux Oliviers. Les deux écrivaines y accueilleront, autour d'un verre à partir de 19 heures, tous ceux qu'intéresse leur résidence d'écriture.
Et deux jours après, le samedi 10, elles "hanteront" encore le lieu, avec Zoxea leur désormais fidèle accompagnateur; le matin dès 10 heures pour un atelier d'écriture autour du thème de l'utopie, l'après-midi au forum à 16 heures pour parler de Louise Michel, l'insoumise de la Commune et de l'utopie encore avec Jean-Michel Couvreur, professeur de philosophie.
Le 8 ou le 10 ou le 8 ET le 10, vous serez les bienvenus !
Et vous pouvez aussi regarder le teaser de notre première intervention de février :
http://www.lieselschiffer.fr/video/la-bellevilloise/

vendredi 2 avril 2010

Dans la peau d’un Bellevillois d’aujourd’hui, par Liesel

J’adore découvrir les nouveaux quartiers de Paris au fil de mes boulots. Ces six derniers mois, je les ai passés le long du canal Saint-Martin, ce coin si vivant du bord de la Seine dans la vieille capitale. Ça me fait un peu penser à Gand, la seule autre ville que je connaisse en Europe. J’ai un ami d’enfance, Adama, qui y travaille depuis cinq ans. Sur le canal, je fus d’abord dans un petit café-resto où je faisais un peu tout : le service en cas d’affluence, la plonge, le ménage après que Pablo, le patron, ait baissé le rideau de fer.
Plus tard, Selimou m’avait dégoté ce super plan dans ce restaurant à la mode. Tous les jeunes qui y vont dîner parlent d’un film célèbre qui y a été tourné il y a longtemps, par une super jolie actrice, paraît-il, avec un nom qui se termine en “i” et qui disait une phrase que tous répètent en rigolant : « Atmosphère, atmosphère, est-ce que j’ai une gueule d’atmosphère ?” Moi je ne trouve pas ça spécialement drôle. De toute façon je ne connais pas le cinéma français, ni le cinéma en général. A Dakar, je suis passé souvent devant le Cinéma central sans jamais y entrer. C’est encore Selimou donc, mon copain du foyer de la rue des Amandiers, un ami, un vrai, de ceux qui vous prêtent un billet de 20 euros les mois de dèche ou vous passe son portable pour un appel urgent au pays. Selimou, c’est un “bandit” comme disait sa mère; il parle à n’importe qui et tout le monde le trouve “charmant”, même les Françaises aux cheveux longs qui sentent si bon mais ont toujours l’air pressé. C’est lui aussi qui trouve toujours des plans pour aller en boîte sans que ça pose trop de problème – ce malin parvient chaque fois à persuader une fille à l’entrée de convaincre le vigile qu’elle est avec nous et ça marche ! – . C’est lui aussi qui déniche les bonnes associations pour suivre des cours de français. Donc, l’autre soir, après la prière, Selimou m’a dit de passer de sa part voir le cuistot de la Bellevilloise, un endroit particulier où on trouve à la fois un resto, des concerts, des bals, tout un tas d’évènements différents, et même, paraît-il, des femmes qui se déshabillent et qui font des numéros avec du feu. Encore plus extraordinaire que mon petit resto pour ceux qui disent “Atmosphère, atmosphère !” C’est pour ça que me voici à descendre à la station Gambetta. Je suis toutes les instructions de Selimou : je me dirige vers le théâtre de la Colline, c’est facile, c’est marqué sur une pancarte. Le théâtre de la Colline... Ce que j’aime bien, à Paris, surtout dans ce quartier du 20ème arrondissement, c’est qu’on marche sur du béton toute la journée avec les feux rouges à la place des étoiles pour éclairer la nuit mais les rues portent des noms de campagne : rue des Prairies, rue des Cascades, théâtre de la Colline.
Je monte la rue de la Bidassoa, à la pente un peu raide, j’évite la rue d’Annam à droite et continue directement. Sur la gauche, des jeunes attendent devant un grand bâtiment en briques rouges qui me rappelle mon lycée. Ils ont l’air un peu moroses avec leurs sacs en bandoulières et leurs i-pod aux oreilles. Moi, j’aimais bien l’école, mais mon père n’a pas voulu que je continue trop longtemps. Il fallait l’aider à nourrir toute la famille. Je suis l’aîné de cinq, tout de même. Sur le trottoir, s’alignent des petites maisons comme à la campagne, avec des courettes et de minces portails de fer. Ça me rappelle cet endroit où j’étais allé faire les vendanges à l’est de la France, l’année de mon arrivée ici. J’avais bien aimé sauf qu’il y avait des chiens partout qui ne laissaient personne entrer dans les maisons. Et en France, un chien, c’est presque comme un homme, tu n’y touches pas ! Il y a même des vieilles dames et aussi des moins vieilles qui leur parlent dans la rue comme à un enfant. Pareil pour les chats. C’est étonnant.
Une grande porte marron m’annonce la Bellevilloise avec des affiches dessus tel que me l’a décrit Selimou. Une fois le seuil franchi, je tombe sur une cour avec des palmiers en pots. J’aime bien, ça me rappelle l’Afrique. Deux types enroulés dans des tabliers s’activent à ranger les poubelles. Un troisième, jeune, les cheveux retenus en queue-de-cheval, m’interroge : “C’est à quel sujet ? Nous ouvrons à 11 heures seulement.” Je réponds que j’ai rendez-vous avec le chef cuistot pour un travail. La mine un peu blasée, il m’indique une petite porte à l’extérieur du bâtiment, plus loin avant un escalier qui monte dans ce qui me semble être le vide… Me voici dans une sorte de grand hangar entreposé de tables avec plein de prospectus, une autre porte indique les cuisines, je la pousse et descends quelques marches. Un grand gaillard blond m’accueille tout de suite d’un ton jovial avant même que j’ai ouvert la bouche : “C’est toi Mamadou Dansaka ? Je t’attendais. C’est pour la place de plongeur ? – Oui ! Bonjour monsieur ! – Salut et bienvenu chez nous. Alors, parlons tout de suite de ce qui fâche, rit-il en me regardant droit dans les yeux, tu es en règle pour les papiers, bien sûr ?” Toujours la même question, mais depuis le temps, je connais le moyen d’esquiver.

mercredi 31 mars 2010

Le fruit de l'inspiration de Zoxea lors de l'atelier d'écriture du 20 mars...

ALLO SAM, C'EST CHERIFA, COMMENT TU VAS, BIEN?

Oui impec et toi quoi d'neuf qu'est-ce que tu deviens?

BEN MOI CA VA, TOUJOURS DANS LE QUARTIER MAIS JE NE T'Y VOIS PLUS.

C'est normal j'ai eu deux trois galères, tu connais mon amour pour la rue.

OUAIS JE VOIS ET SINON TU FAIS QUOI CE SOIR T'AS UN PLAN?

A vrai dire non, je n'ai rien prévu pour l'instant... Pourquoi?

PARCE QU'IL Y A UN CONCERT D'RAP A LA BELLEVILLOISE CE SOIR ET J'AI DEUX
PLACES.

Ah oui c'est cool en plus c'est à deux pas d'chez moi direct j'me déplace.

CHOUETTE JE T'ATTENDRAI A 20H00 EN HAUT D'LA RUE BOYER.

Au fait j'espère qu'c'est pas du rap de jeunots marre d'les entendre aboyer.

AH BON T'AIMES PAS L'RAP J'CROYAIS QU'T'AVAIS ETE BERCE PAR CA.

Tu sais Chérifa j'ai bien changé depuis ces deux années d'carpla.

CA Y EST TU T'ES RANGE DES VOITURES MAINTENANT T'ES DEVENU UN BOBO.

Non pas du tout mais j'préfère les poètes sages comme ce groupe de Boubou.

ATTENDS TU PARLES DES SAGES PO MAIS C'EST EUX QU'ON VA VOIR CE SOIR.

Franchement Chérifa t'assures c'est sûr qu'on va se revoir...

samedi 27 mars 2010

La participation de l'écrivain Benjamin Sehene à l'atelier d'écriture du 20 mars...

Un verre à la Belleviloise

Au sixième étage d'un immeuble de la rue Pelleport, dans le vingtième arrondissement de Paris, deux hommes noirs discutent, assis dans le coin salon d’un appartement exigu :

Jean – “Hier soir j'ai donné rendez-vous à James pour prendre un verre avec nous à la Bellevilloise. La classe, non ?
Michel – Waouh ! Mais nous devions aller voir ton frère, je croyais ?
Jean – Ah, bon ! Mon frère ?
Michel – Ouais… Ton frère !
Jean – Attends, mais on est quel jour, déjà ?
Michel – Samedi 20 mars…
Jean – Oh, putain! Mince, alors. Je dois absolument passer mon manuscrit à Jim et par tous les moyens pour qu'il puisse le présenter à son éditeur.
Michel- Tu ne peux pas le faire une autre fois ? Ou bien, le lui envoyer par la Poste ?
Jean – Non, impossible.
Michel – Pourquoi ?
Jean – Après, je ne verrai plus James avant deux ou trois mois. Il part au Canada, tu comprends ?
Michel – C'est le seul jour de visite autorisée dans le mois au centre de rétention. Et ton frère sera probablement expulsé d'ici quelques jours. Tu ne le reverras peut-être plus jamais.
Jean – Ecoute, faisons quand même un saut à la Bellevilloise, une façon comme une autre de nous détendre. Ok ? Ensuite ce sera peut-être plus facile de se taper l’épreuve de cette prison pour étrangers… Qu’en dis-tu ?”


Benjamin Sehene

vendredi 26 mars 2010

Le texte de Fred Olsen, l'un des participants de l'atelier d'écriture du 20 mars

Promenade dans Belleville


Rue Boyer, elle monte jusqu’à la rue Ménilmontant qui apparaît comme un bout d’horizon, strié par le passage des voitures. A droite, la petite rue Laurence Savard, bordée de maisonnettes que les lierres et les frondaisons envahissent, ses pavés mal sertis, le trottoir si étroit qu’on y marche comme un funambule.

Il est rare qu’on croise quelqu’un dans ces parages. Des enfants en culottes courtes qui jouent au ballon, une jeune femme en jupe longue poussant une porte, un vitrier le dos affublé d’un rectangle de verre posé sur un cadre de bois. Non, aucune rencontre de la sorte. Aujourd’hui, son Rolleiflex en main, Willy Ronis n’aurait plus à saisir de personnage émergeant dans ce tremblement de lumière qu’il affectionnait tant. A travers cette petite rue vide, dodelinant sur la colline de Belleville, on ne voit que des images d’un autre monde. Quel présent a donc pris possession de ces lieux ? A y regarder de près, ce sont encore aujourd’hui des images, d’autres images, qui accaparent mon regard. Sur un pan de mur, s’attroupent les animaux de ménagerie des Mosko, ailleurs court après des mouettes le pantin blanc de Mesnager, plus loin c’est l’homme à l’imperméable noir de Nemo qui cherche à attraper un papillon chamarré. Images aux couleurs éclatantes peintes par des poètes de la rue, images chipées dans un livre des merveilles. Des images, comme si mon regard ne retirait rien d’autre parmi la réalité devant moi, une réalité devenue trop pâle, presque inexistante.

Puis plus en amont, sur la gauche, la façade de La Bellevilloise. Mur de brique, rythme élégant de la construction, formules à la vue du passant claironnant l’esprit rebelle du 20ème : « coopérative ouvrière », « du producteur au consommateur », « maison du peuple ». Après les émeutes de la Commune, le feu des régiments lancés baïonnettes au canon contre le peuple, les amoncellements de cadavres dans les allées du Père Lachaise, il a fallu rêver autre chose. Autre chose que la lutte sans merci, les décombres et la folie furieuse des hommes. On a édifié ce bâtiment imposant avec l’espoir tenace d’une vie meilleure. D’autres images se sont entassées là. Devantures remplies de marchandises, voitures de livraisons prêtes à sillonner aux quatre coins de l’arrondissement, personnel posant en rang d’oignons sur le trottoir, clients attablés dans la grande salle du bas trinquant ou lisant le journal. L’utopie a remplacé le carnage. On a camouflé le crime, maquillé la mort, embelli la vie.

Aujourd’hui la sève de ce lieu s’est évaporée, ne restent que des fleurs séchées, une odeur de vieux livre d’histoire, les pages sans images d’un Malet & Isaac de petit écolier.

Fred Olsen

lundi 22 mars 2010

Atelier d'écriture du 20 mars 2010-Dans la peau d'in bellevillois d'aujourd'hui-Elodie Scée

Atelier du 20 mars 2010 – Dans la peau d’un bellevillois d’aujourd’hui

Mme Armelle, 75 ans
« M’ont fait v’nir pour une réunion des z’habitants du quartier, De-La-Plus-Haute-Importance, qu’y m’ont dit ! Ah, j’rigole fort, moi ! Les z’habitants du quartier, y’en a plus ! Enfin, j’veux dire, des vrais z’habitants, des z’authentiques, du terroir si j’puis dire. Voyez qui c’est maintenant, les z’habitants : des jeunes en jinns, des p’tits bourgeois genre architectes ou dizaïners, comme on dit ; des p’tits couples qui s’engueulent au premier enfant vn’u, j’rigole ! Pensez, à mon époque, c’est au sixième môme qu’on fatiguait ! Les z’arméniens qu’avaient leur boutique au 24 de la rue des Pyrénées, et leur atelier chez eux, les Kouchtrovsky, z’en ont eu douze, croyez qu’y râlaient ? Z’étaient pas dizaïners, les pôvres ! Moi, j’veux bien une réunion des z’habitants du quartier, mais fô voir qui c’est quand même. Veulent me faire venir dans leur Bellevilloise, moi, j’veux bien, mais fô voir la place ! C’est des queues à n’en plus finir pour des concerts j’ose même pas y penser. Y’a d’la drogue c’est sûr, la coiffeuse le dit alors…. « Réunion à la Bellevilloise à 14H, cocktail de bienvenue offert ». Koquetail, j’rigole. Y croient qu’chui un oiseau, que j’picore des olives ? F’rait mieux d’financer les vieux, passque c’est nous, les vrais z’habitants. Ceux d’aujourd’hui, y’m’font marrer, y vont acheter à la Bellevilloise leurs tomates bio à 5 euros, j’rigole. Un lieu de concert qui vend des tomates à des dizaïners en jinns, j’rigole. »
Elodie Scée

dimanche 21 mars 2010

Le texte de Zoxea du premier atelier d'écriture...

Cousin,

J't'écris cette carte en direct du patronnage.
Ça va, j'vais bien, j'm'éclate ici, j'fais pas trop tâche.
J'suis sur qu'tu t'y plairais même si c'est vrai qu'tas pas trop l'âge.
J'avoue parfois c'est dur même si l'soleil marche sur les pas d'l'orage.
Jamais j'me décourage et chouettes sont mes amis.
Mon plus proche entourage c'est Robert, Fred et Annie.
Marie-Paul et Fanny.
Maryvonne et Camille.
Ça rigole, ça picole en douce du pastis à l'anis.
Mais hein ne dis rien à Tonton.
Car on sait bien qu'c'est mal et que donc dure serait la sanction.
Les conséquences seraient grave pour moi ainsi que pour ma section.
Bon aller, j'te laisse, j'ai cours de maths, besoin de réflexion.

Gaston
de la Bellevilloise

vendredi 19 mars 2010

Quelques textes de l'atelier d'écriture de février sur des photos anciennes...

«Je vous envoie cette photo de notre promotion (1904-1905). Nous avons eu les résultats de nos épreuves de fin d’année où, dans toutes les matières j’ai excellemment réussi. Mes professeurs disent que je peux facilement obtenir une bourse qui me permettra de préparer les concours aux grandes écoles, dès la rentrée prochaine. Cet été, comme le prévoit notre statut de pupille, je travaillerai aux ateliers de la Bellevilloise, ce qui me permettra, en outre de me constituer un petit pécule.
Afin que vous ne perdiez pas de temps à me rechercher sur la photo, j’ai entouré mon visage. Juste devant moi, vous reconnaîtrez peut être Henri, ce camarade qui m’avait accompagné lors de ma dernière permission et qui vous assure de son meilleur souvenir.
Votre affectueux filleul.
Georges »

N’eût-il pas entouré son visage qu’on l’aurait vite repéré : il est le seul à ne pas porter l’uniforme des pupilles mais un élégant costume rayé (privilège qui lui a été consenti pour ses bons résultats ?), des médailles (les trophées de ses succès scolaires ?) sont accrochées au revers de son veston, et ce regard froid et déterminé, annonciateur, me souffle t’on de son destin tumultueux.
Gilbert Bouillie


Madame Tixier ne voit plus très clair malgré ses lunettes, à triple-foyers qui rendent son regard brumeux. C’est comme cela qu’en voulant m’offrir les petits gâteaux qu’elle ne manque jamais de me proposer à chacune de mes visites, elle a fait tomber une boîte en fer sur le sol de la cuisine. “Ah quelle vieille bête, je deviens… même plus capable de vous recevoir correctement s’est-elle attristée tentant de se pencher pour ramasser le contenu répandu sur le sol.
Prestement, et pour lui éviter de plier ses genoux que je sais douloureux sous la robe d’intérieur vieux rose, “son uniforme de parade” comme elle aime à dire riant, j’ai rassemblé à deux mains les petits objets : dé à coudre, biscuit de café encore dans sa pochette, bons de réduction d’épicerie, coupon de dentelle passée. Une carte postale aux tons sépias ornée d’un timbre vert à quinze centimes d’autrefois a retenu mon attention. C’était le seul témoignage un peu personnel de cette boîte aux maigres trésors. La curiosité me fit déchiffrer l’adresse inscrite derrière d’une écriture aux rondeurs enfantines malgré l’encre violette, plus mystérieuse : Mademoiselle Rose Lecouturier, 17, boulevard de Picpus, Paris 12ème. Pour tout message figuraient ces deux lignes : “Un petit souvenir de moi et de mon brave Célestin qui m’a permis de faire votre connaissance. Votre très sincère Ernest qui espère vous revoir bientôt.” La signature tout en boucles, ajoutée en dessous donnait l’intégralité du nom du rédacteur, : Ernest Rabadier.
“Qui est Ernest Rabadier ?” demandais-je tout à trac à madame Tixier. La vieille dame, occupée à reprendre sa place sur la chaise de sa cuisine, arrêta son mouvement, interdite, juste capable de répéter “Ernest Rabadier…”, le regard ailleurs.
- “Oui, Ernest Rabadier, là, qui écrit cette carte à Rose Lecouturier. D’ailleurs, qui est-elle aussi cette Rose Lecouturier ?
- Mais c’est moi, c’est mon nom de jeune fille.”
C’était comme si ma vieille voisine que je visitais tous les vendredis venait de me révéler une autre personnalité.
- “Rose Lecouturier, vous vous appeliez comme ça ?
- Oui, c’était mon nom.
- Et Ernest alors, lui, qui était-il ? L’un de vos soupirants ?
- Ah, Ernest, c’est toute une histoire…”
Liesel Schiffer

samedi 6 mars 2010

Bienvenue à la deuxième rencontre...

... avec Liesel, Elodie et Zoxea des Sages Poètes de la Rue, leur invité. Elle a lieu le jour du printemps, le samedi 20 mars et il y sera question de “la Bellevilloise aujourd'hui à travers l'art, les rencontres et le métissage”. Venez-y nombreux !